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OpenAI a analysé des messages sensibles d’utilisateurs : alerte RGPD

OpenAI a analysé des millions de messages sensibles, y compris des informations de santé et des données très personnelles. Pour les équipes conformité et achats, l’enjeu est immédiat : mettre les usages d’OpenAI au niveau du Règlement général sur la protection des données (RGPD) et verrouiller la gouvernance fournisseur, sous peine de risque réglementaire et d’atteinte à l’image.

Ce que révèle l’affaire OpenAI pour la conformité RGPD

Dans les faits, deux griefs se détachent : l’exactitude des données personnelles générées et la transparence sur l’usage des contenus saisis par les utilisateurs. Le Comité européen de la protection des données (CEPD/EDPB) a épinglé les modèles de conversation pour des manquements sur la licéité, la loyauté, la transparence et l’exactitude, rappelant que le fournisseur demeure tenu d’assurer l’exactitude, même si la technologie est probabiliste et sujette aux « hallucinations » ( rapport de la task-force ChatGPT, EDPB ).

En parallèle, l’association de défense de la vie privée NOYB a saisi l’autorité autrichienne, dénonçant une violation du principe d’exactitude (article 5.1.d RGPD) lorsque des informations personnelles fausses sont produites par le modèle et difficiles à corriger par les personnes concernées ( plainte NOYB ). En pratique, ces signaux confirment que les entreprises ne peuvent plus considérer l’outil comme un simple assistant sans impact juridique : toute interaction impliquant des données personnelles doit être couverte par des bases légales claires, des notices d’information, et des mécanismes de contrôle.

S’ajoute la question de l’aspiration du web (web scraping) et de l’usage secondaire des données saisies par les utilisateurs pour l’amélioration des modèles. Les pratiques d’information, de consentement et de retrait doivent être explicitement traitées dans les contrats pour éviter toute ambiguïté, notamment entre offres grand public et offres professionnelles.

openai : faits et signaux réglementaires

Plusieurs autorités européennes ont renforcé leurs contrôles, tandis que des décisions nationales ont déjà contraint OpenAI à ajuster ses interfaces d’information et ses paramètres de confidentialité. Le CEPD/EDPB a documenté des manquements structurels et recommandé des garde-fous techniques et organisationnels renforcés. La plainte de NOYB a, elle, replacé la question de l’exactitude au cœur des obligations du responsable de traitement et de son sous-traitant. En France, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) rappelle une approche « par la preuve » et l’importance d’une analyse d’impact préalable pour les cas à risques élevés, avec pragmatisme lorsque les limites de l’état de l’art sont démontrées ( guide CNIL IA ).

Dans ce contexte, l’ampleur des usages et la présence de données sensibles (santé, sexualité, données financières) amplifient l’exposition. Les organisations doivent assumer que certaines fonctions, comme la mémoire des conversations ou la navigation connectée, accroissent la surface de risque et exigent des règles de partage strictes.

Que faire côté entreprise : contrats, AIPD et garde-fous

Pour les équipes juridiques, le délégué à la protection des données (DPO, Data Protection Officer), la sécurité et les achats, la priorité est d’articuler les usages d’OpenAI avec les obligations internes et le RGPD. Concrètement, il faut traiter l’éditeur comme un fournisseur critique de traitement de données, avec un dispositif contractuel, technique et opérationnel aligné sur le risque.

Cela passe d’abord par la qualification des rôles et des traitements. Si vous développez des cas d’usage via une interface de programmation (API, Application Programming Interface), vérifiez que l’accord de traitement des données (DPA, Data Processing Addendum) d’OpenAI vous positionne bien en « responsable de traitement » et l’éditeur en « sous-traitant » agissant sur instructions. Encadrez précisément les finalités, les catégories de données, les sous-traitants ultérieurs, les transferts internationaux et les durées de conservation.

Côté sécurité et confidentialité, imposez la rétention nulle de données (ZDR, Zero Data Retention) lorsque possible, limitez finement les journaux opérationnels, et paramétrez la résidence des données dans des juridictions adéquates. Exigez le chiffrement en transit et au repos, et challengez les mécanismes d’anonymisation pour les jeux de tests et les prompts internes.

Sur le plan de la conformité, une analyse d’impact sur la protection des données (AIPD/DPIA) est nécessaire dès que des données sensibles ou des cas d’usage à effet significatif sur les personnes sont envisagés. Cette AIPD doit évaluer risques résiduels, scénarios d’erreurs (ex. hallucinations portant sur des personnes), mesures d’atténuation et processus de recours/rectification. Documentez la base légale, l’information des personnes et, si pertinent, les modalités d’opposition.

Enfin, la gouvernance d’usage doit être explicite : quels profils ont accès, avec quel périmètre de données, quelles données sont proscrites, comment les incidents sont remontés et traités. Les accords de niveau de service (SLA, Service Level Agreement) doivent couvrir disponibilité, performance et sécurité, y compris les délais d’effacement et la coopération en cas de violation.

Points de vigilance

  • Interdire le partage de données de santé et de secrets d’affaires dans les canaux non couverts par ZDR
  • Exiger la résidence des données en Europe et cadrer les transferts hors UE
  • Auditer l’exactitude et les biais sur des lots représentatifs, avec revues humaines
  • Mettre en place des bacs à sable anonymisés et un filtrage automatique des prompts sensibles
  • Former les équipes aux risques de fuite par IA de l’ombre (shadow AI) et au signalement d’incidents

Limites techniques et gouvernance fournisseur à durcir

La nature probabiliste des modèles pèse sur l’exactitude et la rectification. Même avec des filtres et des politiques, une information personnelle inexacte peut être produite et circuler rapidement. D’où l’importance de procédures internes de rectification et de désindexation, et de mécanismes pour rejouer des prompts avec des garde-fous renforcés.

Certaines capacités augmentent la sensibilité, comme la mémoire des échanges ou la navigation intégrée. Lorsque l’outil conserve des traces de recherches médicales ou de consultations confidentielles, la charge de la preuve bascule sur l’entreprise utilisatrice : il faut prouver que ces données ne sont pas traitées au-delà des finalités, et qu’elles sont protégées dès la conception (« protection des données dès la conception »). Le principe doit être « opt-out robuste par défaut » pour tout ce qui touche aux catégories sensibles et un cloisonnement fort entre environnements.

Dans les secteurs régulés, la barre est plus haute. La loi américaine sur la portabilité et la responsabilité en matière d’assurance maladie (HIPAA, Health Insurance Portability and Accountability Act) impose un accord d’association commerciale (BAA, Business Associate Agreement) pour manipuler des informations de santé protégées (PHI, Protected Health Information). À défaut de BAA, l’usage doit se limiter à des données dûment dé-identifiées. En finance, les exigences de traçabilité et d’archivage imposent d’évaluer au cas par cas l’adéquation des journaux et des exports pour satisfaire les obligations d’audit et d’investigation.

Pour les équipes, l’« IA de l’ombre » — adoption d’outils non approuvés — crée un risque diffus de fuite et de réentraînement imprévu. Des politiques et contrôles simples aident : blocage DNS de services non validés, portail de demande d’usage, modèles approuvés en libre-service avec ZDR activé, et messages d’alerte contextuels dans les outils bureautiques.

Enfin, la clause de non-réutilisation pour l’entraînement doit être contractuelle, vérifiable et auditée. Demandez des preuves d’effacement, des journaux d’accès, et, idéalement, un tiers d’audit. Lorsque l’usage porte sur des données hautement sensibles, envisagez des alternatives hébergées en Europe ou on-premise, voire des modèles de plus petite taille finement contrôlés, si le compromis performance/risque est acceptable.

Synthèse-action

À court terme, mettez à jour vos contrats avec OpenAI, lancez ou révisez une AIPD priorisée sur les cas d’usage sensibles, et activez la ZDR avec une résidence des données en Europe. En parallèle, verrouillez la gouvernance d’usage et la formation des équipes pour réduire le risque d’« IA de l’ombre » et de fuite involontaire. Dans ce contexte évolutif, documenter, auditer et prouver vos choix devient le meilleur levier pour limiter l’exposition réglementaire et reputationale.

Références utiles : rapport de la task-force ChatGPT (CEPD/EDPB) ; plainte NOYB sur l’exactitude ; guide CNIL sur l’IA .

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